Si l'industrie française des casinos, avec 2,54 milliards d'euros de produit brut des jeux, pèse un dixième de celle des Etats-Unis, elle n'en est pas moins touchée par un mouvement de consolidation inédit. En début d'année, Accor et Lucien Barrière ont annoncé leur mariage pour constituer le numéro un du secteur en France avec 37 casinos et 13 hôtels de luxe. Il pèsera 767 millions d'euros de produit brut des jeux et 923 millions d'euros de chiffre d'affaires. Cette opération est désormais devant les autorités de la concurrence française. «La réponse est attendue pour la fin juillet au plus tard», précise Dominique Desseigne, président de Groupe Barrière. Très présent sur la Côte d'Azur et la côte basque, le nouvel ensemble a déjà fait des propositions à la DGCCRF. Des désinvestissements ne sont pas à exclure.
Les deux acteurs ont donc raflé la place au Groupe Partouche, qui avait racheté deux ans auparavant l'Européenne de casinos au terme d'une bataille boursière contre, précisément, Accor. Ce secteur intéresse désormais de plus en plus les fonds d'investissement : Legal & General a racheté le groupe Moliflor, tandis que Colony Capital est présent au capital d'Accor Casinos et que, ces derniers mois, les fonds Cinven et Permira négociaient avec Isidore Partouche le contrôle de son groupe. Une négociation qui a achoppé il y a quelques semaines.
De l'avis des experts, la prochaine étape est l'Europe. Les groupes français sont déjà présents en Suisse, mais le marché britannique, qui sera déréglementé fin 2005, suscite les convoitises et Accor a créé un joint-venture avec le britannique Luminar pour développer un nouveau concept de casinos outre-Manche.
En attendant, les casinotiers se plaignent de la hausse de la fiscalité. En dix ans, la part des prélèvements de l'Etat et des communes est passée de 45,2% à 55,25% du produit brut des jeux, décomposée en sept prélèvements distincts. Mais leur courroux a redoublé ces dernières semaines, après l'annonce d'une hausse de 2% de la CSG dans le projet de loi sur l'assurance-maladie, dont l'impact est estimé à 28 millions d'euros sur la profession, tandis que la CRDS passerait de 0,50% à 0,65%. Or cette taxe est six fois supérieure pour les casinos et une hausse de 0,15 point représenterait un surcoût de 22 millions d'euros pour les 180 casinos français. Une hausse qui a toutefois été refusée par Matignon.
Quoi qu'il en soit, les groupes de casinos demandent une pause dans cette hausse pour plus de prévisibilité et la mise en place d'un impôt unique propre à la profession. «Cette fiscalité nous oblige à bouger, il y va de notre survie !», explique Dominique Desseigne, qui estime que «les politiques viennent de faire le constat de l'impact de ces hausses sur notre profession qui emploie 17 000 emplois directs.» Pour le groupe Lucien Barrière, une telle hausse impliquerait une baisse de 40% de son résultat.
(source : lefigaro.fr/Aude Sérès)