Le nouveau directeur du casino Barrière, entend faire de ce lieu iconique un pilier du lien social et du rayonnement territorial, dans un contexte de transition stratégique.
« J’ai commencé comme valet de pied au casino de La Rochelle », une entrée en matière presque théâtrale pour celui qui dirige aujourd’hui l’un des établissements les plus prestigieux du groupe Barrière. François-Stéphane Vergne aime rappeler ce parcours ascensionnel, entamé à l’origine comme un job d’été. Il est ensuite devenu enseignant en centre de formation pour apprentis, puis formateur au sein du groupe, avant de revenir vers les salles de jeu : « Je n’ai pas pu choisir entre l’un et l’autre, alors j’ai fait les deux, de jour et de nuit. » Cette double casquette, entre pédagogie et exploitation, façonne encore aujourd’hui son approche managériale. Après Dinard, La Rochelle, Saint-Brévin, puis huit années à Saint-Malo, le voici à la tête du vaisseau amiral normand.
Un rythme touristique en dents de scie
« Deauville, c’est une station qui s’exalte du vendredi soir au dimanche, avec une montée spectaculaire en juillet-août », observe François-Stéphane Vergne. Contrairement à Saint-Malo, où l’activité est constante du lundi au dimanche, toute l’année, le nouveau directeur du casino de Deauville devra composer avec un tempo saccadé. Un exercice qu’il connaît bien : « La Baule fonctionne de la même manière. C’est un type d’établissement qu’on apprend à anticiper. » Ce rythme en vagues impose une gestion très fine des équipes, des événements et des services annexes. Mais François-Stéphane Vergne y voit surtout une formidable opportunité d’intensité : « Tout se concentre en un temps court, ce qui rend l’expérience exaltante, tant pour les visiteurs que pour nos équipes. »
L’après-2026 : entre incertitude et vision
Si le week-end attire les touristes, la semaine appartient aux fidèles. « C’est là qu’on échange le plus. On a du temps, et une relation différente. » Pour François-Stéphane Vergne, l’ancrage local ne se décrète pas. Il se vit au quotidien. « Les partenariats culturels, sportifs, associatifs…se construisent naturellement. Et le casino, de toute façon, est connecté structurellement à son territoire. » Cette réciprocité est d’ailleurs bien partagée : « Je pense que les Deauvillais le savent. »
La délégation de service public (DSP) actuelle prendra fin en avril 2026. Une échéance stratégique. « Ce n’est jamais une formalité. Il y a une concurrence, un appel d’offres. On doit présenter un projet séduisant, à la fois pour la ville et pour l’établissement. » Ce qui complique l’exercice, c’est l’horizon temporel : 18 ans. « Il faut imaginer le tourisme, les usages, les comportements dans près de deux décennies. C’est vertigineux. » Pour le patron de l’établissement, cela impose une capacité d’anticipation « souple, agile, presque organique. »
On ne vient plus seulement jouer, on vient vivre quelque chose.
François-Stéphane Vergne.
À l’heure où les casinos en ligne grignotent des parts de marché, le directeur de l’établissement de jeux deauvillais ne s’inquiète pas, il réfléchit. « Le modèle tient si nos établissements restent des lieux de vie. Je parle de visiteurs, pas seulement de clients. Il faut qu’ils viennent pour l’expérience. » Et il les énumère : spectacles dans la salle des Ambassadeurs, dîners animés, événements thématiques, gastronomie, art de recevoir… « Ce week-end, par exemple, nous accueillerons le chanteur Icare, un dîner-spectacle mais aussi des gens qui viennent juste admirer l’endroit. » Pour le maître des lieux, c’est là que réside l’avenir des casinos physiques : « Offrir ce que le numérique ne pourra jamais simuler. Un contact, un regard, des surprises. »
À l’extérieur, la façade côté terre vient d’être rénovée. Trois autres façades suivront. Mais au-delà de l’entretien, c’est bien d’une montée en gamme qu’il s’agit. « La stratégie a été enclenchée sur nos hôtels, elle se poursuit sur nos casinos « affirme le directeur. À l’approche de la nouvelle DSP, chaque mètre carré compte : » C’est à la fois un impératif technique, réglementaire et stratégique. « L’établissement de Deauville doit rester un joyau, et cela passe par l’investissement » concède François-Stéphane Vergne.
Une sensibilité artistique en filigrane
Chez François-Stéphane Vergne, pas de lubie personnelle ni de désir de se mettre en avant. « Les missions du groupe sont déjà très ambitieuses. Je m’efface derrière elles. » Mais il admet une inclination intime : « J’aime les beaux spectacles. J’y suis sensible. Et je resterai attentif à cette dimension. » Ce sera sa touche, discrète mais assumée, dans un lieu où la scène et le jeu ont toujours cohabité. Peut-être est-ce là, au fond, sa signature : veiller dans l’ombre à faire briller les autres, et offrir à Deauville un casino aussi vivant que sa scène.
(source : actu.fr/Sophie Quesnel)