Peu de voix pour la rallonge
« Ne participe pas. » « Refus de vote. » « Non participation .» Fait remarquable, quinze conseillers municipaux sur quarante-neuf n'ont pas pris part au vote sur le casino, hier. Le maire (PS) Yves Urieta demandait aux élus d'en confier la gestion au groupe Tranchant un an de plus, le temps de refaire un nouvel appel d'offres. Il a obtenu le feu vert, mais avec trente-quatre voix « pour » seulement.
La droite, une partie de sa majorité et de l'opposition de gauche ont décidé de ne pas entrer dans le scrutin, pour montrer leur désapprobation. « Quelle fabuleuse ironie de nous voir proposer de prendre deux décisions opposées à quelques mois d'intervalle », a souligné Eric Schatz (opposition de gauche, liste Verts et ouverts).
Pourtant difficilement soupçonnable de se désolidariser de sa chère majorité, l'adjoint Henri Lambert a également décidé de ne pas voter. « Je ne peux participer à une décision sans davantage de précisions, juridiques ou autres », a-t-il expliqué.
Enquête. Pierre-Louis Faure, qui aurait dû prendre les rênes du casino municipal à partir du 28 juin était dans la salle. Son groupe avait été choisi le 10 février par le conseil municipal au terme d'une procédure de délégation de service public. Il devait prendre la suite du groupe Tranchant pendant quinze ans. Le choix en sa faveur, porté par André Labarrère et sa majorité, fut alors critiqué par l'opposition de droite et de gauche. Mais la semaine dernière, le 13 juin, le nouveau maire Yves Urieta a résilié le contrat qui liait la ville et le groupe Faure. Le motif invoqué est le suivant : au lieu d'une caution à la signature du contrat le 27 février, le groupe Faure n'a produit qu'un « engagement de principe ».
Mais était-ce bien la seule raison du revirement ? Le conseil municipal bruissait, hier, du rapport de la mission interministérielle d'enquête sur les marchés publics et les délégations de service public, dont le contenu a « fuité » dans la presse. Cette mission s'est penchée sur l'affaire paloise à la demande de la justice, auprès de laquelle le groupe Tranchant a déposé une plainte. Elle aurait conclu qu'il y a bel et bien matière à poursuivre pour délit de favoritisme.
Ce délit est puni par le code pénal de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende.
Procédure judiciaire. L'argument du délit de favoritisme « est d'un autre bois » que ceux que vous avancez, a lancé hier Martine Lignières-Cassou (PS). « Ce que je crains, a dit l'élue PS, c'est que la fragilité juridique des arguments que vous employez expose la ville à payer au groupe Faure des dommages et intérêts importants ». Le groupe Faure a en effet engagé une procédure judiciaire devant le tribunal administratif.
« Ce rapport de la commission n'est en rien dans ma décision » a répondu Yves Urieta. « Je ne le connaissais pas. Il va m'être communiqué. » « Mon sentiment est que mon prédécesseur (André Labarrère ndlr) était de bonne foi. Parce qu'il avait confiance dans le groupe de Pierre-Louis Faure, il avait accepté que le versement de la caution ne soit pas fait le 27 février. Mais cela ne veut pas dire pas fait quinze jours avant l'échéance ! » Le maire a également rappelé que si le casino s'arrêtait, la ville perdait deux millions d'euros par an et les salariés seraient au chômage.
Ironie des dates, c'est aujourd'hui, au lendemain du conseil municipal qui a vu la concession du groupe Tranchant rallongée d'un an, que le tribunal administratif examine sur le fond la plainte de Tranchant contre la ville de Pau. Elle date de plusieurs mois.
(source : sudouest.com/Natacha Thuillier)